Les artistes/graffeurs bien connus internationalement en tant que 123Klan célèbrent cette année leur 25ième anniversaire d’existence.
– Novembre 1992. Grand Master Flash à Paris. Un concert manqué. Une histoire qui dure depuis 25 ans.
Note : À lire en écoutant la playlist Rap classic de 123Klan.
Photo ©Nickie Robinson25 années de travail acharné qui font qu’aujourd’hui, c’est deux maîtres de la « spray can » n’ont plus rien à prouver car leurs œuvres parlent pour eux.
« Prouver quoi, à qui, pourquoi ? Je suis un être libre qui a plaisir à vivre de sa passion. » – Klor
Passion… une expression qui revient souvent dans le discours des deux artistes et que l’on retrouve dans la définition du mot « Clan » : groupe de personnes se soutenant mutuellement par passion ou intérêt. Larousse.
Et cela résume tellement bien l’univers de 123Klan : ils sont bien sûr un duo d’artistes, des partenaires d’affaires mais aussi et surtout un couple, une famille, des parents et des amis.
“Personnellement, je suis très inspiré par leur vie personnelle … les hauts et les bas d’un couple travaillant ensemble, plus les enfants (!!), et une entreprise florissante. Très impressionnant.” – Jason Botkin, artiste muraliste et co-fondateur du collectif EnMasse.
« Je trouve tout le temps cool de voir un couple avoir une belle synergie autant dans la vie que dans le travail. » – McBaldassari, artiste, illustratrice et muraliste.
Les artistes
123Klan c’est, à l’origine, un groupe de graff. Deux graffeurs qui travaillent ensemble depuis qu’ils ont 16 ans. S’ils sont surtout connus en tant que groupe, derrière celui-ci, il y a d’abord et avant tout 2 graffeurs fort différents et complémentaires.
⇒ Elle est Klor, l’acharnée, la fonceuse et l’irrévérencieuse occasionnelle.
⇒ Il est Scien, le déterminé, le perfectionniste et le doux (en apparence – ne vous attaquez pas à sa famille et à ceux qu’il aime).
Si le parcours de Scien (1989) est plus conventionnel pour un graffeur et fait la fierté de ses parents, les débuts de Klor sont assez révélateurs de la personnalité actuelle de la graffeuse.
« En novembre 1992, lors du Concert des Grand Master Flash à Paris, il n’y avait plus de place dans la voiture. Alors je suis sortie en douce la nuit, j’ai volé quelques bombes, et j’ai posé mon nom pour la première fois seule. Quand le Crew est rentré, il a passé devant la pièce et ils se sont dit « Tiens, qui est ce nouveau graffeur ? …Mes parents n’ont jamais su pour mes activités illégales. » – Klor
Ils ont choisi leur pseudo en fonction des lettres qui leur plaisaient. Rien d’étonnant car pour eux, tout repose sur l’esthétique de la lettre.
« Pour ma première pièce, j’avais signé K-Rol (Carole) et puis j’ai pensé à inverser les lettres de la 2eme syllabe. Je ne voulais pas un nom qui sonne féminin. En plus le K et le R placés en début et fin se répondent parfaitement d’un point de vue graphique. » – Klor
« L’origine du nom Scien est accidentelle. Il voulait faire un graff Science pour son cahier d’école, seulement il n’y avait pas assez de place. Scien … personne n’avait pensé à ce nom. » – Klor.
Scien – Photo ©Nickie Robinson
Les partenaires d’affaires ou #styleisthemessage
Cette propension et amour de la lettre explique, en partie, leur transition de l’art vandale au travail d’artistes en galeries et de graphistes/designers. En faisant du graff, ils ont pris conscience qu’en même temps, ils faisaient du graphisme ce qui les a attirés dans cette voie.
« On a pas decidé de faire de graphisme, ça s’est fait de manière naturelle, on a découvert juste un outil, puis on l’a utilisé. » – Klor (référence #1)
« Le graffiti sur les murs, ça effraie les gens car c’est étiqueté tags, vandales et compagnie. Mais quand c’est transposé dans l’univers vectoriel, ça devient tout de suite quelque chose d’acceptable. Cette transposition fait en sorte que, comme on utilise l’informatique, on était devenu des gens bien. » – Klor (référence #1)
Alors graduellement, ils ont utilisé la technologie pour étendre leur art. Le Web est devenu pour eux comme une grande murale. Une extension virtuelle de leur travail dans la rue.
«When street knowledge meets technology, and graffiti art melts with graphic design. »
Ils ont d’abord fondé leur studio de création (1995) spécialisé dans le branding, la création de logos et la direction artistique puis leur propre marque de vêtements BANDIT1$M spécialisée dans le streetwear. Aujourd’hui, leur boutique en ligne offre une grande diversité de produits: vêtements bien sûr mais également affiches, oeuvres, d’art et même jouets.
La liste des clients, avec qui ils sont collaborés au cours des année, est impressionnante : Adidas, Coca Cola, Converse, Cossette, Microsoft , Mini Cooper, Nike, Hurley, Lamborghini , MTV, Pepsi, Playstation , Reebok, Sony, Wired, pour ne nommer que ceux-ci.
« 123klan c’est une famille de chillionnaires ayant réussi a développer une identité artistique propre à eux. D’une propreté digne de la Nasa, leur esthétique mixe le graffiti classique avec des éléments graphiques et est facilement reconnaissable dû à leur travail acharné depuis plus de 20ans sur la scène internationale. » – Monk.e, artiste, muraliste et rappeur.
Petite information pour les Montréalais, ce sont eux qui sont derrière la nouvelle mascotte des Stingers pour l’Université Concordia à Montréal.
Mais bien que québécois dans l’âme (ils vivent à Montréal depuis fort longtemps), 123Klan n’en demeure pas moins très français. Ils jouent beaucoup sur leur « french arrogance ». Le paradoxe de leur situation les fait bien rire car si dans la majorité des pays, le graffiti est catégorisé comme un acte criminel, eux, ils arrivent en en faire un commerce légal.
« Donc on vend du crime quoi, c’est du banditisme. On joue beaucoup avec ça, comme le t-shirt “Have fun kids”, avec la bombe, c’est un truc super mignon qui dit en gros “vas défoncer la ville à la bombe”. On aime bien jouer avec ces clichés-là, on est très sarcastique. » – Klor (référence #1)
Un couple
« Le graffiti est vraiment romantique ! » – Scien (référence #1)
« Personne n’est meilleur que l’autre, disons que nous sommes complémentaires, du coup on est meilleurs ensemble. L’union fait la force. » – (Référence #2)
« Il est toujours inspiré par ce que je fais. Et vice-versa.» – Klor
« Si je fais une pièce seul, il me manque un gros morceau à côté de moi. C’est vraiment organique et pour tout ce qu’on fait, et bien c’est comme ça. C’est pourquoi il n’y a pas un style propre à Scien ou à Klor. Il y a NOTRE style. » – Scien (référence #1)
Une famille – des parents.
Depuis leur début, beaucoup de bombes aérosols ont été vidé et beaucoup d’encre a coulé sous leurs plumes. Le duo est devenu un quatuor. Ils sont parents de 2 enfants: Cléo et Tommy aka Aiik. 2 enfants qui ont grandi et ils sont maintenant de jeunes adultes. Et comme la pomme n’est pas tombé bien loin de l’arbre, ceux-ci ont appris à manier la bombe aérosol et à l’occasion, ils intégrent le Klan et les accompagnent sur les murs.
Klor et Cléo Photo ©Nickie Robinson
Une belle famille qui, en 2016 , a traversé ensemble une grande épreuve: problème de santé pour Klor – #fuckcancer. Mais ils en sont ressortis plus soudés que jamais et avec un profond attachement à la joie de vivre.
« Carpe Diem, plus que jamais. Les mésaventures de l’an dernier m’ont fait réaliser à quel point il est important de profiter de chaque instant. » – Klor
Des amis
Depuis 25 ans, ils ont collaboré avec nombre des plus grands et plusieurs de ceux-ci sont devenus leurs amis.
« Peindre est synonyme de bonheur et partage. Sans cela, ça ne vaut pas la peine. » – Klor
C’est par leur gentillesse, leur façon d’acceuillir et de s’intéresser aux autres qu’ils se sont fait une place bien spéciale dans le coeur de la communauté locale et internationale d’artistes.
« 123 Klan sont ma famille; ce sont les mêmes personnes dès la première fois que je les ai rencontrés. J’aime ce qu’ils font et pour moi ils sont au top du jeu. J’ai hâte de voir ce que l’avenir réserve à Scien, Klor et 123Kids. » – Sen2 Figueroa, graffeur et artiste portoricain basé à New York.
« Je les aime » – MissMe, artiste vandale.
À Montréal, leur port d’attache, ils comptent de nombreux amis bien sûr mais ils ont également eu une grande influence sur toute une génération de jeunes artistes.
« Le style de 123 Klan avec ses couleurs en aplats, l’utilisation de la typographie et des éléments graphiques m’a énormément influencé lorsque j’étais jeune et que je découvrais les lettres. De plus, c’est probablement grâce à ce style que j’ai décidé de continuer mes études en design graphique. » – Arnold, graphiste, illustrateur et muraliste
Montréal
Mais pourquoi ces deux frenchies du nord de la France ont-ils choisi Montréal pour y vivre, fonder leur famille et développer leur business ?
« Il y a plusieurs raisons en fait. Montréal c’est mortel. Bien mieux qu’en France. On y est venus à Montréal pour voir une amie, et arrivés sur place, on a dit : on y est, on y reste.» – Scien (Référence #2)
Dès le début, la communauté montréalaise leur a ouvert grand les bras ce qui a facilité grandement leur intégration. Pour Klor, « Montréal est une ville où il fait bon vivre et la scène montréalaise est riche car prolifique, et différente. On y retrouve une belle brochette d’artistes qui se serrent les coudes quand la situation l’impose.»
« Ils ont été une force très importante localement, surtout au sein de la communauté des graffeurs, mais ils ont aussi été parmi les premiers à s’impliquer dans des projets commerciaux sérieux, en travaillant avec de grandes marques, etc. Les histoires à succès locales sont toujours agréables. Ils ont eu une bataille difficile en tant que couple français en territoire québécois.» – Jason Botkin
Les partenaires ont également trouvé à Montréal une culture du street wear, sportswear très présente et un marché plus large, plus lucratif et donc plus intéressant qu’en Europe. Leurs projets, créations artistiques et vêtements sont d’ailleurs tous fait à Montréal, à la main, « 100% Amérique du Nord », comme ils sont fiers de le dire.
Et maintenant….
En 25 ans, 123Klan n’ont jamais arrêté de vivre leur passion. Ils sont des artistes connus internationnalement et sont régulièrement invités à des évènements et à des festivals partout dans le monde autant en tant qu’artistes qu’en tant que conférenciers..
Cette année, ils ont participés au festival Osheaga, au festival UnderPressure (auquel ils participent presqu’à chaque année depuis 2007), à une conférence du festival Mural et au festival Pow Wow Worcester (USA) .
« Quand nous avons sélectionné les artistes pour le POWWOW 2017,Worcester !, l’équipe voulait mettre en valeur des personnes dynamiques. Des artistes de rue, graphistes, graffeurs, entrepreneurs, influenceurs sociaux et des gens qui se démarquaient. 123 Klan est tout cela et beaucoup plus. Et comme nous voulions, cette année, également mettre l’accent sur les jeunes, et bien nous avons eu la chance d’ajouter aussi Cleo et Aiik à la programmation et ensemble, le Klan a totalement secoué le Elm Park Community School. » – Che Anderson, un des 2 directeurs du POWWOW Worcester.
Mots de la fin
Y’a-t-il quelque chose que vous n’avez jamais dit mais que vous désirez dire aujourd’hui?
« Respect, Peace, and Unity » C’est ce qui a fait que je suis tombée amoureuse de cette scène dans les 90, et je veux persister à garder ces valeurs. Le graffiti est une grande famille avec de nombreuses branches, et comme dans toutes les familles, il y a de la chicane parfois, mais dans le fond … » – Klor
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*** Bon anniversaire à vous 123Klan ***
Continuer à nous faire profiter de votre talent et de votre joie de vivre. On vous aime fort.
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Un remerciement spécial aux artistes et personnalités qui ont contribué à cet article.
Références
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